Adolescents et numérique : Quelles sociabilités ? Mémoire de Master 2 par Gwénaëlle André, animatrice multimédia à Ploemeur (56)

adolescent et iphoneGwénaëlle André est une pionnière des espaces publics numériques. Animatrice multimédia à Ploemeur depuis plus de 12 ans dans cette commune bretonne, elle a favorisé des projets numériques qui s’inscrivent sur le territoire en introduisant une approche pédagogique qui pose un recul critique par rapport aux outils et aux pratiques avec les publics ainsi qu’une dimension créative (cf. ses activités dans un article de NetPublic.fr publié en juillet 2010).

Depuis lors, Gwénaëlle a repris des études pour préparer un Master 2 Sciences de l’Éducation “Technologies de l’Education et de la Formation” à l’Université Rennes 2. Elle publie aujourd’hui le mémoire dans le cadre de ce cursus avec comme terrain d’observation l’espace multimédia : Adolescents et numérique : Quelles sociabilités ? (mémoire en pdf, 143 pages).

Le mini-site de Gwénaëlle André (CV, références, contact…) : http://gwenaelle.olympe.in/

Interroger différents aspects du numérique vs. l’adolescence

Au coeur de l’interrogation de l’étudiante, une réflexion poussée sur la recherche de compréhension de l’adolescence et du rôle que jouent les TIC (Technologies de l’Information et de la Communication : réseaux sociaux, téléphones portables…) dans la sociabilité des jeunes. Comment et dans quels buts s’approprient-ils les technologies ?

Après avoir présenté le terrain d’enquête (Ploemeur et la mise en place de l’observatoire jeunesse), Gwénaëlle André se pose des questions relatives à la sociabilité numérique des jeunes : Qui sont les adolescents ? Quels sont leurs lieux de sociabilité ? Quel rôle le numérique joue-t-il dans leurs sociabilités entre pairs ? Comment s’approprient-ils les Technologies de l’Information et de la Communication en tant qu’objet social et culturel ? Quel rôle a le numérique dans leurs relations avec les adultes et la société ?

L’espace multimédia : lieu en évolution et terrain de pratiques

La présentation du contexte n’est pas neutre : l’espace multimédia est le lieu de travail et de stage de la chercheuse ; c’est donc dans un mode d’observation participante que va se situer le sujet étudié. On y apprend et comprend l’évolution dans le temps de ce qu’est un EPN : dans son organisation, ses activités, les publics et son évolution sur un territoire avec un projet impliquant in fine : l’observatoire jeunesse de la ville qui intègre la préoccupation du numérique.

Les “jeunes” : ça n’existe pas ?

Dans une démarche sociologique et ethnographique, Gwénaëlle André recueille l’expression de l’adolescent à travers propos et pratiques. Elle distingue alors plusieurs hypothèses : les jeunes sont hétérogènes (et donc parler de la jeunesse comme un ensemble “uniforme” n’a pas de fondement légitime) ; les adolescents utilisent les lieux numériques (par exemple les EPN – espaces publics numériques) comme un échappatoire, lieu de rencontre entre pairs et de construction identitaire ; les adolescents constituent une population ségréguée, stigmatisée par les adultes.

Les adolescents apprennent les technologies d’abord par l’entraide entre pairs

10 portraits d’adolescents sont passés au “crible” via des interviews. Territoires, vie privée (ou vie semi-publique ?), engagement associatif, pessimisme sur le devenir professionnel sont observés avec soin. On apprend aussi que l’informatique ne supplante pas d’autres activités chez les jeunes, mais s’insère dans le temps libre de ceux-ci.

L’apprentissage de l’informatique et une certaine technicité se fait par les pairs (mais aussi par des vidéos) avec la création de réseaux informels de solidarité techniques d’échange de savoirs en quelque sorte, mais entre jeunes (et non pas prioritairement avec des adultes).

Typologie de pratiques numériques adolescentes

Gwénaëlle André dresse ensuite une typologie intéressante des pratiques numériques adolescentes :

  • des usages communs : communication interpersonnelle ; outils de reconnaissance entre pairs (like sur les sociaux, photos partagées, vidéos commentées) ; outils pour monter sa singularité (dessins…) ; commentaires ; téléchargement (pour la gratuité et la richesse des découvertes…et comme culture commune),
  • des pratiques plus personnelles : retouche photo ; création de site ; jeu ; ouverture à différentes cultures.


Parents et enfants : une définition différente de l’utilité du numérique

La relation parents-adolescents autour des sujets Internet et informatique peut s’avérer problématique, source d’incompréhensions voire conflictuelle… car parents et et jeunes n’ont pas la même représentation du numérique. Les parents visent l’utilité chez le jeune (ordinateur et l’Internet pour les devoirs…) alors que les adolescents s’en servent davantage pour communiquer avec leurs pairs.

En outre, les adolescents s’interrogent sur certaines pratiques : les raisons de l’interdiction du téléchargement par exemple ou du filtrage ou non d’Internet suivant la diversité des lieux (établissement scolaire, espace multimédia, domicile).

L’apprentissage entre pairs adolescents ne pose-t-il pas problème ?

En conclusion, Gwénaëlle André décrit un mode de construction identitaire pluriel de l’adolescent avec le numérique comme territoire agissant :

“Les adolescents se construisent (…) dans un “entre soi” à l’abri du regard des adultes. C’est justement ce repli qui pourrait être problématique, d’un point de vue éducatif. L’appropriation des instruments numériques n’est pas innée. On l’a vu, selon le groupe de pairs dans lequel il se situe, l’adolescent s’adonnera avec plus ou moins de facilité et d’audace à telle pratique.

Ce mode de transmission forcément restrictif, renforce les inégalités et recloisonne l’espace numérique à un “entre soi” qui devient ainsi exclusif. L’enjeu est ici d’intégrer les pratiques adolescentes à une littératie plus vaste.

Cet apprentissage du numérique doit porter aussi bien sur les pratiques que les cultures, impliquant la capacité d’utiliser, de comprendre les logiques en cours, l’approche critique, mais aussi la mise en capacité d’agir sur son environnement. Cette intégration resituerait les habiletés adolescentes développées dans un contexte socio-économique et culturel en pleine mutation.”

Un mémoire très intéressant pour qui s’intéresse à la question des pratiques numériques des jeunes et à leur construction identitaire dans la société.

Contact

Espace Multimédia
Gwénaëlle André

Rue de Kervam
56270 PLOEMEUR
02.97.86.41.60
Courriel : gwenaelle.andre@gmail.com
Netvibes de l’EPN : http://www.netvibes.com/espacemultimediadeploemeur

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